LUNDI 27 AOUT, SIX HEURES DIX. FEAT MELVYNN.

Sans avoir réveillée son partenaire de chambre qu’elle ne connaissait que trop peu, Alex quitta sa chambre, une serviette sous le bras. Il devait être aux environs de six heures du matin, autant dire que la maison était bien silencieuse. Elle aurait pu donner rendez-vous à Melvynn à n’importe quelle autre heure mais elle aimait le fait d’avoir la piscine pour eux tout seuls. Et pour tout avouer, elle avait beaucoup appréciée leur discussion en tête à tête de nuit la semaine précédente et s’était dit que c’était un cadre qui leur convenait fort bien. N’ayant pas emporté de maillot une pièce, c’est en bikini qu’elle sortit pour rejoindre les bords de la piscine. L’été avait beau être présent, la froideur du petit matin ne l’épargnait pas et entoura ses épaules de la serviette tout en sautillant sur place pour ne pas se transformer en glaçon. Lorsqu’elle entendit la porte s’ouvrir, elle se tourna et offrit un grand sourire à Melvynn. Il devait avoir l’air aussi réveillée qu’elle qui avait tout de même prit le temps de boire un café et d’avaler un croissant. « Alors, prêt champion ? » Un sourire malicieux étira ses lèvres et la blonde désigna la piscine d’une œillade. « J’espère que t’es pas frileux ! » Elle-même devait avouer qu’elle n’était pas pressée de s’approcher trop près de l’eau. « Bien dormi ? » La politesse lui imposait cette question même si elle n’avait jamais très bien comprit pourquoi. Après tout s’il n’avait pas fermé l’œil, elle n’y pouvait pas grand-chose. « Un dernier mot avant que tu te transformes en glaçon géant ? » S’approchant de la piscine, elle déposa sa serviette sur un transat et se pencha pour plonger la main dans l’eau. Oui, c’était bien ce qu’elle pensait, la température n’était pas vraiment excellente.

Fin de semaine éprouvante pour le garçon. Lors du jeu de la tentation organisée par la production, il avait insulté Marnie comme la dernière des traînées, simplement parce qu’il refusait de lui obéir au doigt et à l’œil. Par la suite, une dispute sans précédent avait éclaté entre sa partenaire et lui. De plus, ses deux potes de l’aventure, Liam et Shakespeare, se faisaient discrets. Et inutile de mentionner l’incident pendant la soirée latino. Ainsi, le moral de Melvynn n’était pas au plus haut. Pourtant, l’idée de passer la matinée en compagnie d’Alexa suffisait à lui redonner le sourire. Motivé, il sortit de son lit pour se diriger dans la salle de bain. Il se passa de l’eau sur le visage, mit du déodorant puis enfila son short de bain et un pull à capuche. En passant par la cuisine, il attrapa une pomme et rejoignit la piscine, sa serviette sur l’épaule. « Prêt ! Le sport et toi, tout ce dont j’ai besoin. » Répondit-il souriant avant de croquer à nouveau dans sa pomme. Certes l’eau froide aurait plutôt tendance à le freiner, néanmoins hors de question de jouer le difficile devant Alexa. Il esquiva volontairement la question portant sur son sommeil. Il n’était pas vraiment doué pour échanger des banalités et ne voulait pas ennuyer la belle avec ses problèmes.

Même s’il se baignait avec les pingouins de la banquise, il ne pourrait se transformer en glaçon si la belle restait à ses côtés en bikini. Pour une fois, il se remercia intérieurement de n’avoir pas pensé tout haut. Il s’accroupit au bord du bassin et caressa délicatement l’eau du revers de la main. Effectivement elle n’avait pas tort. Il termina son fruit, abandonna le tronçon au pied d’une chaise longue et ôta son pull. Il s’approcha alors dangereusement d’Alexa, la tenant par les épaules. La tentation était trop grande. « Donne-moi une seule bonne raison de ne pas te jeter à l’eau ? » Demanda-t-il avec humour.

Parfaitement réveillée grâce à la charmante brise matinale, la jeune femme esquissa un sourire face à la répartie du brun. « Ah ah, rappelle toi donc ça quand tu plongeras dans la piscine ! » Elle ne voulait pas non plus qu’il la déteste, après tout, c’était l’habitant avec lequel elle s’était le plus rapprochée. Lui et Dimitri étaient pour l’instant, les seuls qu’elle pouvait se targuer de connaître un peu plus. Elle ne faisait vraiment pas d’effort c’en était presque navrant. Mais elle connaissait les prénoms de tout le monde. Génial… La blonde se figea lorsqu’il s’approcha d’elle pour l’agripper par les épaules. Non parce que son contact la gênait mais principalement parce qu’elle avait peur de plonger à l’eau d’un seul coup. Mais elle n’avait pas dit son dernier mot. Elle n’était pas très bonne actrice mais elle essaya quand même. « Melvynn ne fais pas ça s’il te plait. L’eau est très froide et tu pourrais t’en vouloir… » Empêcher sa voix de trembler de rire était assez difficile mais elle pensa qu’elle ne s’était pas trop mal débrouillée. « Moi, pas. » Entre temps, elle avait posé ses mains sur les siennes, comme pour s’y agripper. D’un coup d’épaule, elle se délesta d’une de ses mains et attrapa l’autre fermement pour le tirer avec elle dans l’eau tandis qu’elle sautait. Avec l’effet de surprise, elle arriva à le faire basculer avec elle et ce fut sa seule satisfaction lorsque son corps s’enfonça dans l’eau glacée. Remontant rapidement à la surface, elle éclata de rire tout en bougeant activement pour essayer de faire refluer le froid. S’éloignant le plus possible du brun, elle l’arrosa d’une main en riant. « Il fallait bien se lancer de toute façon ! » Continuant à battre des pieds, elle ramena ses cheveux en arrière et observa Melvynn entre ses cils mouillés pour s’assurer qu’il n’était pas vexé.

Sans qu’il ne puisse tenter le moindre mouvement, il se retrouva plongé dans l’eau entrainé par Alexa. Il aurait dû se douter qu’il ne pourrait piéger une basketteuse aussi facilement. L’arroseur arrosé. Le garçon devait reconnaître qu’elle était pleine de ressources et plutôt douée. Il éclata de rire à son tour, s’accoudant au bord du bassin pour reprendre son souffle. Il aurait sa revanche, demain ou le jour suivant, et elle serait aussi froide que l’eau de la piscine. « Tu sais que c’est à charge de revanche hein ? » Malheureusement son sourire amusé trahissait le ton menaçant de sa voix. En compagnie d’Alexa, le New Yorkais n’était pas vraiment crédible dans le rôle du méchant garçon revanchard.

« C’est parti Coach ! Je suis tout à toi… dans la limite du raisonnable bien sûr. » Aurait-il retrouvé goût à la provocation ? Et si elle avait raison, et s’il ne gâcherait rien ? Ces quelques mots qu’elle avait prononcés l’autre soir dans la cuisine avaient regonflé son ego. A l’heure actuelle, il tentait désespérément de lutter tant bien que mal contre sa timidité.

A priori, le jeune homme prenait tout à fait bien la chose. Après tout c’est ce qu’il s’apprêtait à lui faire subir alors elle ne s’attendait pas non plus à ce qu’il crie à la trahison. Alex éclata de rire lorsqu’il lui annonça que c’était à charge de revanche. Non pas parce qu’elle ne s’attendait pas à ce que ce soit le cas mais bel et bien parce qu’elle aussi l’attendrait au tournant. « La moitié de l’année, je vis avec une vingtaine de filles, crois moi, je suis devenue bien plus retorse que tu ne le penses ! » Elle était passée experte dans l’art d’inventer de nouvelles surprises à ses camarades. Le coup de la confiture dans les chaussures c’était démodé. Aujourd’hui elle mettait de la mayonnaise dans le gel douche et réveillait ses camarades avec un grand seau d’eau froide. C’était ça la belle vie. Bien évidemment, elle n’arrivait pas toujours à tout déjouer mais prenait toujours tout à la rigolade. Il faut bien décompresser comme on peut.

Esquissant un léger sourire, la blonde secoua la tête et leva exagérément les yeux au ciel. « Qui fait le malin, tombe dans le ravin ! » Expression absolument insupportable qu’elle entendait chaque jour depuis son enfance et qu’elle avait prit l’habitude de répéter. « Honnêtement, je lutte pour rester éveillé et j’ai même pas eu droit à my heart will go on donc je suis un peu déçue ! » Aucun rapport avec le Titanic si ce n’est qu’elle avait l’impression qu’elle allait geler, un peu comme Rose. C’est ce qu’on lui avait raconté en tout cas, elle s’endormait toujours à la moitié du film. « Je te propose un truc. » Elle s’approcha du bord où il se trouvait pour s’y appuyer à son tour. En réalité elle n’avait pas grand-chose à proposer, aussi sa phrase ne dut-elle pas ressembler à grand-chose. « Tu nages, la piscine est petite alors ça fait des petites longueurs alors on va se croiser souvent enfin bref, à chaque fois que tu me dépasses, tu peux me poser une question ou un truc dans le genre. Enfin je reconnais c’est pas le saint graal mais je n’ai pas refait de gâteau alors j’ai rien d’autre à proposer et… » Elle s’arrêta et se racla légèrement la gorge, gênée. « Enfin bref, toi tu fais des longueurs et moi je nage pour rester vivante ! »

Pour le coup, il était définitivement tombé dans le ravin.
« Every night in my dreams, I see you. I feel you. That is how I know you go on… » Chantonna-t-il avant d’exploser de rire. Chantonner était en effet un bien grand mot. Cela ressemblait plutôt à un vulgaire rap mal orchestré. Il s’essaya même sur les notes les plus difficiles, massacre assuré : « Near, faaar, whereeeeeeeeeever you are, I believe that the heart does go on. Once more you ooooooooooooooopen the door and you're here in my heart. And my heart will go on and on ! » Tâchant de reprendre son sérieux, il prit son air de garçon fier et déclara : « Satisfaite ? »

A peine eut-elle terminé de lui expliquer les règles du jeu qu’il commença déjà à nager en crawl, certes plus rapidement qu’à l’accoutumée. Il voulait, d’une part, essayer de l’impressionner. Pratiquant la natation depuis son plus jeune âge, il maîtrisait relativement bien la technique des quatre nages. D’autre part, son esprit de compétition était particulièrement motivé par l’enjeu. De quoi en apprendre davantage sur la fille qui lui plaisait, que demander de mieux. Ainsi après quelques longueurs, il parvint à la rattraper. Il l’attrapa délicatement par le pied pour la tirer vers lui. « Première question, ton personnage préféré dans FRIENDS ? » Lexa était obligée d’aimer Friends, tout le monde adorait cette série. Certes, il s’agissait peut-être d’une question superficielle mais la réponse l’intéressait. Elle ne pourrait que l’aider à cerner davantage la personnalité de son interlocutrice.

Le rire de la blonde s’est vite joint à celui de son compagnon. Il n’y avait pas à dire, il n’avait pas peur du ridicule. Parce que ça l’était, c’était certain mais c’était aussi osé. Il en fallait de la confiance en soit pour chanter my heart will go on dans une piscine gelée. Elle se stabilisa quelques secondes avec les jambes seulement pour applaudir à tout rompre à la fin de son solo. Posant une main sur sa poitrine, elle mima une intense tristesse. « Oh Jack, mon Jack, je t’en prie ne meurs pas. Reste avec moi. » Elle lui tendit sa main comme si la sienne était à trois kilomètres mais qu’il avait tout de même la possibilité de l’attraper. Comme une actrice de soap opéra en réalité. Elle ne résista cependant pas à l’envie de rire et se laissa aller à la fin de sa très, très déchirante réplique. « Absolument, complètement, irrémédiablement satisfaite ! » Elle se mordilla la lèvre avant d’ajouter. « T’as clairement loupé ta vocation là ! » Riant de nouveau, elle s’installa dans un coin pour ne pas trop le gêner et nagea sur le bord de la piscine.

Se sentant tirée en arrière, elle se laissa faire et se retrouva de nouveau très près du brun. Qui était fort rapide, il n’y avait pas à dire. La blonde resta interdite devant cette question peu conventionnelle pendant quelques secondes avant de se reprendre. « Euh… Monica ? » Elle ne put s’empêcher que sa réponse sonne comme une question. A vrai dire, elle ne regardait que rarement la télévision et si elle connaissait les personnages de plusieurs séries de réputations et de part les conversations de ses amies, cela s’arrêtait là. « C’est celle qui est un peu maniaque c’est bien ça ? » Elle se sentait obligée de poser la question parce qu’elle n’en était pas certaine. En tout les cas ce devait être le personnage qui lui ressemblait le plus et donc celui qu’elle préférerait. Logiquement. « Je ne regarde pas vraiment la télévision hormis le sport. » Elle fronça le nez et l’arrosa légèrement. « T’as droit à une nouvelle question parce que je suis super généreuse. » Alex lui offrit un grand sourire avant d’ajouter. « Et pour ça. » Elle posa les mains sur ses épaules et appuya de tout son poids pour le faire couler. Elle n’était pas vraiment certaine que l’effet de surprise allait prendre cette fois cela dit.

« Je crois qu’on prêt à conquérir Hollywood ! » S’exclama-t-il pour saluer ses talents improvisés d’actrice. Encore une autre raison de l’aimer davantage. Lexa savait plaisanter, entrant dans des délires parfois des plus farfelus. Imprévisible et pleines de surprises, comment pouvait-il rester de marbre ? Il avait certes craqué immédiatement sur son physique à couper le souffle mais au fur et à mesure qu’il apprenait à découvrir sa personnalité, ses sentiments ne cessaient de s’intensifier.

Monica donc. Il hocha la tête, oui il s’agissait bien de la maniaque un peu hystérique. A vrai dire il n’y avait pas de mauvaise réponse, les six personnages du show télévisé avait chacun leur propre charme. Pris au dépourvu, le garçon se laissa couler mais agrippa la jeune femme par les poignets pour l’entraîner avec lui vers le fond du bassin. Une fois tous les deux entièrement sous l’eau, il la relâcha et remonta à son tour à la surface, inspirant une grande bouffée d’air entre deux éclats de rire. « Si je coule, tu coules avec moi. Dans notre version de Titanic, pas de surivant ! » Reprenant ses esprits, il trouva rapidement une nouvelle question à poser. « Selon toi, ton plus gros défaut ? » Demanda-t-il poussé par sa curiosité. Il paraissait qu’on appréciait quelqu’un pour ses qualités mais qu’on l’aimait pour ses défauts. Hypothèse à vérifier. D’autant que les défauts, lorsqu’ils n’étaient pas insupportables, se révélaient souvent être la facette la plus intéressante de la personnalité.

« Mais la question est, Hollywood est-il prêt pour nous ? » Alex esquissa un sourire mystérieux avant d’éclater de rire. S’ils étaient prêts à devenir de grandes stars de cinéma, il était certain que le cinéma lui, n’était probablement pas prêt pour eux. Autant pour leur grande carrière à venir ! Mais ils pouvaient toujours se convertir en pingouin vu qu’ils supportaient bravement et sans se plaindre une eau des plus froides. Dans laquelle ils s’enfoncèrent à nouveau tous les deux lorsqu’il s’attacha à elle pour la faire couler avec lui. Son succès dura à peine quelques millièmes de secondes avant d’être englouti. C’est en riant qu’elle retrouva la surface et écarta quelques mèches de cheveux de son visage. « Tsss, mais qui va raconter notre magnifique tragédie après ? » Son ton avait beau paraitre désespéré, elle ne l’était pas du tout, bien au contraire. « En plus on a quand même loupé pas mal de scènes, il me semble qu’il la dessine et tout… » Nue. Hum, ce n’était peut-être pas le commentaire parfait de circonstance mais ils étaient amis. Non ? Enfin.

La nouvelle question ne tarda pas à arriver. Son pire défaut ? C’était difficile, elle avait l’impression d’en avoir bien plus que la plupart des gens. Et elle avait tendance à penser que c’était totalement impartial de juger de ses propres défauts. Mais soit, c’était la question et un deal est un deal. « Hum. Disons que je pense que ce qui surplombe le tout c’est que je suis maniaque. Mais pas maniaque du genre mon dieu il y une tache sur la nappe. Maniaque du genre toi tu fais la vaisselle et toi tu refais les carreaux parce qu’ils sont franchement bâclés. » Hum hum. Elle s’éclaircit légèrement la gorge avant de tourner la tête quelque peu embarrassée. Elle n’avait pas vraiment honte mais c’était une partie de sa personnalité qu’elle n’affectionnait que peu. « Bon. » Elle l’arrosa pour la forme avant de se reculer en nageant. « On parle beaucoup de moi mais qu’est ce que je peux faire moi pour poser mes questions ? » Elle s’accouda au rebord de la piscine et le dévisagea. « Par exemple si tu pouvais tuer une personne sans être incriminé, qui ce serait ? » Question comme une autre…